l'HUMANITÉ Chronique dans le port Rotterdam.
l'Humanité
Chronique Dans le port de Rotterdam,
il n'y a pas que des marins qui chantent
Publié le
Jeudi 28 mars 2024
Philippe RIO Lassé, meurtri, le maire de Rotterdam, Ahmed Aboutaleb, démissionne après quinze ans de bons et loyaux services auprès de ses concitoyens. Dans le port de Rotterdam, il n'y a pas que des marins qui chantent et les rêves qui les hantent. Les narcotrafiquants font vaciller les gouvernements néerlandais successifs et mettent en danger l'État de droit en menaçant de mort les
responsables politiques, comme l'ancien ministre de la Justice. Malgré des saisies record parmi les livraisons portuaires, les autorités néerlandaises sont face à des organisations transnationales hypercapitalistes qui ont pour chair à canon des jeunes mineurs, des sans-papiers et des sans-droits. Le maire social-démocrate de Rotterdam, qui fut l'autre meilleur maire du monde à mes côtés, en 2021, est même allé tirer le fil de ce trafic mondialisé jusqu'en Amérique du Sud en se rendant au Pérou, pays producteur de cocaïne, et en Équateur,
pays de transit. L'État s'y est effondré sous la pression des bandes criminelles et la maire de San Vincente vient d'y être assassinée. Ahmed Aboutaleb résume : « Un gramme de cocaïne en Europe, c'est un mort
en Amérique latine. » En bons capitalistes, les narcotrafiquants misent aussi sur une politique de l'offre renouvelée. Le trafic de cocaïne, la drogue onéreuse des élites, risque d'être rapidement dépassé par des produits de synthèse. Dans leur laboratoire, des « cuisiniers » rivalisent d'ingéniosité et de manipulations moléculaires pour créer les drogues de demain, toujours plus destructrices et moins chères. Le fentanyl, 50 fois plus ravageur que l'héroine, décime déjà les États-Unis avec un mort toutes les
sept minutes. Et son arrivée, en Europe, ne semble qu'une question de temps. En France, nos villes sont le théâtre de violences, de corruption, d'une économie souterraine et parfois de l'exploitation de mineurs de moins de 10 ans pour faire vivre des supérettes de la drogue. Les politiques de prévention ont été réduites comme une peau de chagrin au profit de vaines opérations de communication où l'on montre les muscles, comme celle du gouvernement la
semaine dernière à Marseille, avant que les dealers ne reprennent le terrain. Face à cette menace mondialisée de la drogue, aux côtés des politiques de lutte contre le
terrorisme, il est urgent de protéger les citoyens et l'état de droit contre les narco-organisations. L'Italie a mis en place des lois antimafia qui pourraient faire école, en saisissant les biens des boss
de la mafia. Avant de quitter la scène politique, lors du Forum européen de la sécurité urbaine de Bruxelles du 20 mars, intitulé « Sécurité, démocratie & villes », Ahmed Aboutaleb a lancé un vibrant appel à des coopérations sur la santé, la justice, la police et les douanes. Il appelle à mettre fin à ce déni de trafic mondialisé, afin qu'on ne meure plus de la drogue sur les trottoirs de Rotterdam, de
Marseille ou de Lima.
A découvrir aussi
- Suite de l'université du PCF
- Lancement de la caravane des jours heureux ! Avec Fabien ROUSSERL. VIDEO
- Lors de la première audition de notre commission d’enquête sur l’influence croissante des cabinets privés sur les politiques publiques, Éliane Assassi interroge Thierry Lambert, délégué interministériel à la transformation publique : VIDEO