L’aveu…d’Agnès Buzyn
« On aurait dû tout arrêter, c’était une mascarade » : les regrets d’Agnès Buzyn
Catastrophée par la crise sanitaire, l’ex-ministre de la santé revient pour « Le Monde » sur sa campagne à Paris et son départ du gouvernement en pleine crise du coronavirus. Ce qu’elle dit est terrible et pourtant je l’avais dit à cette époque, ce qui jugera ce gouvernement ce pouvoir ce seront deux choses, la première c’est d’avoir utilisé le 49.3 pour faire adopter une étape vers la livraison de nos retraites et de notre protection sociale à des fonds de pension, alors que le krach était imminent avant le coronavirus…La deuxième chose c’était d’envoyer le ministre de la santé alors que la courbe de l’épidémie montait aller mener une campagne électorale -en remplacement d’un catho fervent qui s’était branlé devant une caméra- rien ne dit mieux l’état de nos “élites” complices. Elle a honte et pleure et c’est au moins ça à son honneur… mais ce sont les mêmes qui nous disent que Cuba et la Chine sont des dictatures
(note de danielle Bleitrzach)
Agnès Buzyn, dans un bureau de vote du 5e arrondissement, à Paris, le 15 mars.
JULIEN MUGUET POUR « LE MONDE »
« Je me demande ce que je vais faire de ma vie. » Agnès Buzyn est enfin rentrée chez elle, lundi 16 mars, en milieu d’après-midi. Elle vient de « fermer la porte du QG » de sa campagne parisienne et a posé son sac, seule, « effondrée », dit-elle. Elle pleure, et ses larmes n’ont rien à voir avec celles « d’émotion » et de « déchirement » essuyées entre deux sourires lors de la passation de pouvoir au ministère de la santé, il y a un mois. Ce sont des larmes lourdes, de fatigue, d’épuisement, mais aussi de remords.
Elle se livre sans fard et l’aveu est terrible. « Quand j’ai quitté le ministère, assure-t-elle, je pleurais parce que je savais que la vague du tsunami était devant nous. Je suis partie en sachant que les élections n’auraient pas lieu. »
A mots à peine cachés, l’ex-ministre de la santé reconnaît ce qui la déchire : fallait-il abandonner son posteen pleine tempête, alors qu’elle devinait le drame à venir ?
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Agnès Buzyn n’est arrivée qu’en troisième position à Paris et sans attendre les directives de La République en marche (LRM) ou l’annonce du report du second tour, a annoncé ce lundi qu’« en raison de la situation sanitaire et dans les hôpitaux », elle se retirait du jeu. « C’est ma part de liberté, de citoyenne et de médecin. » L’avait-elle donc perdu, ce libre arbitre, durant son aventure électorale ? Ses propos le laissent deviner. « Depuis le début je ne pensais qu’à une seule chose : au coronavirus. On aurait dû tout arrêter, c’était une mascarade. La dernière semaine a été un cauchemar. J’avais peur à chaque meeting. J’ai vécu cette campagne de manière dissociée. » Le mot dit tout. A-t-on jamais gagné une élection en affichant pareille dualité ?
Tragédie intime
En politique aussi, l’inconscient parle. Dimanche 15 mars, Agnès Buzyn est allée voter dans le 5e arrondissement, près de chez elle. Essayer de voter, plutôt. La tête de liste de LRM avait d’abord oublié sa carte d’identité chez elle, dans un autre sac. Le temps que son équipe s’active, elle a fait le pied de grue devant le bureau de vote. Au moment de glisser son bulletin, impossible de débloquer la pompe du flacon de gel hydroalcoolique… Mauvais karma, mauvais signal.
Le soir, elle a été distancée par la maire socialiste sortante, Anne Hidalgo, et par Rachida Dati. Benjamin Griveaux aurait-il fait mieux ? « Sûrement pas, tranche-t-elle. Quand je suis arrivée, il était à 13 %. » Par tempérament, Agnès Buzyn n’est pas du genre à jouer les supplétifs. Si elle s’est présentée, c’est avec la conviction qu’elle pouvait bousculer le jeu. C’était son moment, pensait-elle. Ou son calvaire, vues les circonstances. Aujourd’hui, c’est toute cette séquence qui lui revient, jusqu’à faire de sa confession l’expression d’une tragédie intime.
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