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Marx ou rêve… et les deux non ?

Peut-être est parce que j’ai atteint un certain âge ou plutôt un âge certain, mais mes convictions, qui jadis se traduisaient en impatience, paradoxalement m’incitent de plus en plus à me situer dans le temps long, pas celui de l’urgence, de l’événement, non celui de l’inexorable. La conscience de cet inexorable n’est pas l’art de remettre aux calendes grecques le nécessaire changement révolutionnaire, mais bien au contraire d’affirmer son actualité avec de plus en plus de tranquillité parce que tombent les illusions sur ce qu’on peut attendre de tous les rafistolages.

La contre-révolution, que nous vivons depuis 1991, brise tous les rêves d’émancipation par la bonté et la bonne volonté du capital. Nous tentons en ce moment  de retenir ce que nos pères ont conquis. C’est juste ne serait-ce que parce que sans cette bataille, nous n’aurons jamais conscience de la nécessité du communisme et celle de l’arracher au capitalisme. Mais sans perspective politique révolutionnaire,  pour reprendre une image saisissante de Marx, c’est comme si nous voulions arrêter la putréfaction du cadavre d’un cheval mort. Nous avons à la Libération installé du communisme dans le capitalisme, de la protection au sein de l’exploitation, parce que les rapports de forces le permettaient. Ils le permettaient au niveau national où un capital, massivement mouillé dans la collaboration, tentait de préserver l’essentiel et y arrivait, au niveau international alors que L’URSS sortait auréolée du respect général, mais exsangue et de fait obligée de survivre face à la montée en puissance des USA qui avait engrangé les bénéfices de la guerre. L’URSS a accompli des miracles, mais jamais celui de renverser l’hégémonie du capital à l’échelle mondiale, le cheval continuait à se putréfier. Peut-être que le paradoxe est que la chute de l’URSS a dévoilé le caractère totalement dépassé du capital en laissant s’exhaler les vapeurs de la charogne.

 

Au titre des convictions, le spectacle de cette accélération de l’histoire que représente l’épisode Trump, flanqué de ses vassaux européens effrayés, qui sont prêts à se dessaisir de ce qui leur reste de pouvoir pour en sauver les débris [1], m’incite plus que jamais à penser qu’il n’y a pas d’autre issue que le communisme et que celui-ci a besoin d’un parti pour être une réalité. La bourgeoisie qui s’est fait sa légitimité sur sa capacité à exprimer le pouvoir du peuple, en est à tenter de briser le cercle d’airain de sa légalité pour affermir son pouvoir face à celui du peuple. La guerre, l’ultime manière de masquer la réalité de la distance entre l’oppression et son masque démocratique.

 

Le socialisme en est à ses balbutiements par rapport à la grande question de la propriété. La Chine assume  des contradictions à la traille de cet immense pays, de la durée de son histoire : choisir ce que le capitalisme offre comme accumulation primitive pour une société sortant du sous développement, mais le laisser voler dans une cage, conserver le contrôle de la planification pour assumer la nouvelle étape scientifique et technique. Accepter que sous un parti communiste le peuple fasse l’expérience du capitalisme et n’en rêve pas mais le vive jusqu’à ce que remonte l’exigence égalitaire. Donner à cette conquête du bien être, de l’aisance, une perspective autre, celle de l’émancipation humaine par un retour à Marx, tout cela avec le pragmatisme chinois, une sorte de NEP qui assume la dialectique des contraires comme le mouvement même qui abolit l’ordre des choses existant. Je lis en souriant ce texte de Marx :

« Certes entre le socialisme chinois et le socialisme européen, le rapport peut-être le même qu’entre la philosophie chinoise et la philosophie hégélienne. C’est néanmoins un fait réjouissant de voir le plus vieux et le plus inébranlable empire de la terre amené, en huit années, par les balles de coton de la bourgeoisie anglaise, au seuil d’un bouleversement social dont les résultats ne manqueront pas d’être les plus significatifs pour la civilisation. Lorsque, dans leur fuite désormais imminente à travers l’Asie, nos réactionnaires européens échoueront finalement devant la Grande muraille de Chine, aux portes conduisant au bastion de l’archiréaction et de l’archiconservatisme, qui sait s’ils n’y liront pas cette inscription :
République Chinoise, Liberté, égalité, fraternité. » [2]

Sacré Marx, on ne s’en lasse pas, 200 ans après.

 

Il m’arrive alors de rêver -le rêve intégral- à l’ange de l’histoire de Walter Benjamin, cette créature qui avance à reculons et tente de ramasser toutes les aspirations inassouvies des révolutions avortées, celles de toutes ces victimes silencieuses de l’exploitation, ces meurtres légitimes accomplis dans le silence des oppressions amnistiées, encensées. Qui a l’amour de l’Histoire ne peut que naviguer entre une sorte de mépris pour le genre humain et la conscience pourtant que tout ce qui a du prix, ne serait-ce que l’art, l’amour et la vie même n’ont de sens que par rapport à ce genre humain si décevant. Le matérialisme est aussi la conscience que cette aspiration à l’élévation n’est que duperie hypocrite s’il ne part pas de la glèbe, de l’état réel de ce que nous sommes.

 

Pour rester sur le fond, je suis convaincue ai-je dit qu’il faut un parti communiste et que tout autre « solution », du mouvement qui a besoin d’un apprenti dictateur et de médiocres conspirateurs à sa tête, en passant par les alliances futiles entre partis de la petite bourgeoisie ne mènent nulle part ou pire. Mais franchement, je perds l’enthousiasme à vous convaincre. Il est des gens que je respects parce qu’ils s’acharnent à défendre la nécessité de ce parti, mais quand un âne n’a pas soif et s’entête à ne pas boire, les âniers sont parfois détestés. Certains communistes ont décidé de rester quoiqu’il arrive dans la tranchée et d’y mourir plutôt que de mener l’assaut. On ne peut s’empêcher de se dire que Staline leur tirant dans le dos pour les obliger à affronter le nazisme, était peut-être un mal nécessaire. Je ne le pense même pas d’ailleurs, parce que certes il permet de vaincre la bête immonde, mais pour le socialisme, je suis assez d’accord avec les camarades chinois, une telle direction extrême s’épuise et a du mal à opérer les changements nécessaires.

Mais je vous assure que c’est pour bientôt… et que le capital le sait, même si nous nous l’ignorons.

 

Danielle Bleitrach



15/07/2018
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