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Révolution est leur cri...

 

« La révolution nait des entrailles de la tristesse » a écrit le poète syrien Nizar Qabbani. Toutes les images des citoyens de Beyrouth rapportées par les télévisions, tous les témoignages des Libanais reflètent cette sidération, cette tristesse, le désespoir parfois mais aussi la colère contre leur pouvoir responsable du cataclysme qui amplifie encore leurs souffrances. Du reste, en présentant la démission de son gouvernement, ce lundi 10 août, le premier ministre, M. Hassane Diab, s’est senti obligé de vertement critiquer le système politique et la corruption. Le Fonds monétaire international a refusé de renégocier avec lui  la dette du pays qui s’élève à 90 milliards de dollars, sans avoir l’assurance de la mise en œuvre de « contre-réformes » ou d’un « plan d’ajustement structurel » qui signifieraient encore plus de pillage des ressources du pays, plus d’austérité, plus de destruction de services public essentiels pour les offrir  aux appétits insatiables  du capitalisme international.

 

Une voie de sortie de crise pour les Libanais ne peut venir que du respect de leurs aspirations. Pas d’ingérences extérieures dont leur pays n’a que trop souffert. Ainsi, les sorties du président de la République française sont plutôt malvenues de la part d’autorités qui depuis des décennies couvrent le système politique libanais. Plus complices que sauveurs.

 

La démission du gouvernement libanais n’est pas suffisante pour le peuple en marche. C’est le système qu’il veut changer. Cela suppose que les Libanais, avec leurs organisations démocratiques, transforment leur colère en un projet de changement et de transformation sociale, politique et démocratique, de reconstruction de leur Etat dont ils puissent être les maitres de bout en bout. Leur mouvement populaire contre la crise économique, la corruption et pour la justice ne doit pas être dévoyé. C’est l’une des raisons pour lesquelles ils ont besoin de notre solidarité agissante. Le lourd bilan de cette explosion s’ajoute encore aux malheurs précédents : sans doute plus de 160 morts, 6000 blessés, peut-être plus de 300 000 sans-abris et une partie importante des immeubles de la capitale libanaise en ruines ou endommagés. Tout ceci est la conséquence et le révélateur du degré avancé du pourrissement des institutions étatiques.

 

En effet, la cargaison de 2750 tonnes de nitrate d’ammonium chargée sur un navire battant pavillon moldave, le « Rhosus », appartenant à une société russe, était destinée au Mozambique. Le navire faisait escale dans le port de Beyrouth en novembre 2013 et, depuis, sa cargaison hautement dangereuse, y était stockée, sans précautions particulières. Alors que les autorités du port, celles des douanes, le gouvernement étaient au courant, aucune disposition n’a été prise pour sécuriser le port. Pire, ce cocktail explosif jouxtait  un stock de feux d’artifices ! Le mouvement populaire libanais a donc raison de faire le lien entre cette explosion et l’implosion de l’Etat. Tout est à repenser : le partage du pouvoir entre factions libanaises qui ne fonctionne plus, la crise bancaire et la perte de valeur de la monnaie, signes de l’effondrement de l’économie, l’appauvrissement des classes moyennes qui veulent quitter le pays. Depuis 1989, existe pourtant un accord pour la construction d’un Etat civil. Non seulement, rien n’a avancé en ce sens mais le personnel politique dominant profite du système jusqu’à participer au capital de certaines banques et à posséder des intérêts privés dans quelques grandes entreprises de service qui lui sont acquises. C’est cela qui est fermement remis en cause aujourd’hui. C’est le sens de la révolution à laquelle appellent les Libanais qui manifestent dans les rues et devant les ministères. Cette ébullition populaire ne doit pas être volée.

 

Une enquête internationale indépendante et transparente sous l’égide des Nations Unies doit permettre d’établir les causes de cette explosion.

 

L’aide internationale pour la reconstruction doit être bien plus élevée que ce qui ressort de la conférence des donateurs et se faire sans conditions, à l’exception  de la vérification qu’elle sert bien l’objectif de rebâtir la ville et les logements, tout en garantissant aux Libanais l’accès aux denrées de premières nécessités.

 

L’Humanité s’associe au Secours populaire français pour organiser des collectes de dons pour une aide d’urgence du quotidien des familles populaires.

 

Elle doit aussi se déployer dans les camps de réfugiés palestiniens et syriens sur le territoire libanais.

L’intervention des banques centrales internationales et du FMI doit se faire sans conditionnalités de privatisations ou d’austérité supplémentaires mais au contraire se fixer des objectifs visant avant tout le développement humain, notamment pour la santé, l’école, l’accès à l’énergie et à l’eau.

 

L’immense colère populaire qui parcourt le pays du cèdre est à la hauteur des souffrances et du crime commis. « Révolution » est leur cri. Notre solidarité doit se hisser à ce niveau.

 

Patrick Le Hyaric



14/08/2020
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